Leçon d'architecture dans hall d'immeuble


 

Hall de l'unité d'habitation de Marseille (1947-1952), Le Corbusier (1888-1965)

  
Le Corbusier (1888-1965) connaissait bien le pouvoir de la lumière sur la matière.
Il savait qu'elle est un allié sans égal pour le béton brut mal-aimé. Il travaillait le béton en travaillant la lumière, ou bien l'inverse... 
Chaque nouveau passage à l'unité d'habitation de Marseille est l'occasion pour moi de le vérifier et de prendre, au passage, une leçon d'architecture !

En accrochant la lumière au mur, il brise l'austérité du lieu et fait écho aux compositions abstraites et colorées de ses contemporains, Piet Mondrian (1872-1944) et Théo Van Doesburg (1883 - 1931). Ces peintres néerlandais ont été une véritable source d'inspiration non seulement pour notre architecte mais aussi pour l’architecture moderne en général. Durant toute la première moitié du XXème siècle architecture et peinture étaient fortement liées et s'influençaient mutuellement : certains transformaient l'architecture par la peinture  (peinture de Théo Van Doesburg à la Villa Noailles en 1925) et d'autres concevaient des plans de maisons comme des tableaux abstraits (plan du projet "Brick Country House" de Ludwig Mies Van Der Rohe, conçu en 1922 )

Mais revenons au hall de la cité radieuse... et à ses poteaux, eux aussi en béton brut. Leur particularité vient du fait qu'ils ne sont pas réduits à leur simple fonction d'éléments structurels. Ils sont aussi des éléments de décor : leur coffrage soigné et la lumière rasante suffisent à les habiller et à créer une modénature. Certains pourront même voir dans les traces laissées par le coffrage du béton, le souvenir des cannelures des colonnes de l'architecture de la Grèce antique...

Bref, le béton est brut mais ce qu'il raconte est finalement plutôt raffiné !





Theo Van Doesburg, Composition VII (1917)
huile sur toile, 85 cm x 85 cm
 


 

Piet Mondrian, Composition au grand plan rouge avec jaune, noir, gris et bleu (1921)
huile sur toile 59.5 cm x 59.5 cm






Colonnes de l'architecture grecque, gravure sur cuivre de Piranèse (1720 - 1778)
(extrait de "La théorie de l'architecture, de la Renaissance à nos jours", Taschen)